La France est un pays important pour la récolte des algues. En particulier, les côtes bretonnes sont une zone essentielle de croissance des algues. Les scientifiques ont identifié plus de 700 espèces d’algues en mer d’Iroise, autour de l’archipel de Molène mais également autour de Roscoff ou au large de Bréhat. Ecosystème important pour toute la faune, gisement abondant et varié ; mais qu’en est-il exactement du prélèvement de cette biomasse pour la transformation ? Les derniers chiffres nous montrent une production stable depuis une dizaine d’années dominée par la récolte des laminaires et des fucales.
Algues de fond
La France est le deuxième producteur d’algues en Europe après la Norvège. Elle produit chaque année entre 70 000 et 90 000 tonnes d’algues fraiches issues de la récolte de populations naturelles.
Cette récolte s’effectue majoritairement par bateaux pour récolter des laminaires. Lors du dernier forum Idealg qui s’est tenu à Roscoff en novembre 2019, Martial Laurans de l’Ifremer présentait les données actualisées de cette récolte embarquée et mécanisée.
Actuellement une trentaine de bateaux actifs pêche 50 000 à 60 000 tonnes fraiches de Laminaria digitata et 15 000 à 20 000 tonnes fraiches de Laminaria hyperborea. Cette récolte est concentrée en mer d’Iroise, frontière entre les eaux tempérées chaudes et froides, ayant peu d’échanges avec les eaux du large et qui concentre l’essentiel du gisement des algues en France.
En addition, une petite activité de récolte d’algue subsiste dans le Pays basque. C’est l’algue rouge Gelidium sesquipedale, arrachée par les éléments, qui est collectée en mer quand elle est dérivante (coupe interdite) ou ramassée à terre pour celles échouées (conditions de collecte et ramassage fixées par Arrêté Préfectoral). Une dizaine de bateaux restent actifs pour cette collecte. Des articles de presse relativement récents évoquent 1000 à 1600 tonnes frais/an débarquées en France à Saint-Jean de Luz, pour un envoi en Espagne dans une usine d’extraction d’agar.

Algues de rive
Les autres algues exploitées en France sont récoltées à pied par des récoltants professionnels d’algues de rive et représentent depuis quelques années environ 4500 à 5000 tonnes de prélèvements annuels en Bretagne.
En Bretagne, cette pêche est très encadrée par le comité régional des pêches de Bretagne (http://www.bretagne-peches.org/), permettant d’assurer le contrôle et la gestion de cette biomasse sauvage et pérennisant ainsi l’environnement et les entreprises. Les jours de pêche et de récolte ainsi que le nombre de récoltants sont fixés afin de ne pas surexploiter les algues, d’ajuster la récolte en fonction de la croissance et de laisser des zones de jachère. En 2018, 79 licences de récolte d’algues de rive à titre professionnel ont été délivrées, soit le nombre maximum de licences fixé par délibération du CRPMEM de Bretagne et la récolte a été assurée par 277 récoltants dont 136 récoltants saisonniers.
Plus récemment, et afin d’accompagner le développement de cette activité le long des côtes atlantiques, des arrêtés réglementant la récolte des algues de rive ont aussi été pris ou soumis à consultation publique pour la Région Pays de la Loire ainsi que la Charente Maritime. La récolte à pied des goëmons de rive est aussi règlementée dans les Pyrénées Atlantiques. Les volumes récoltés dans ces zones restent néanmoins beaucoup plus faibles que ceux collectés en Bretagne.
Récemment, la compilation des données déclaratives de récolte fournies mensuellement par les récoltants professionnels aux DDTM de Bretagne a été publiée. Elle permet de connaitre les espèces d’algues récoltées et les tonnages disponibles pour les tranformateurs. Ces données sont présentées dans le rapport de synthèse du programme Biomasse algues 2016-2019 « Evaluation et gestion de la biomasse exploitable en algues de rive » (http://www.bretagne-peches.org/?titre=programme-biomasse-algues&mode=peche-a-pied&id=366). Les auteurs de ce rapport soulignent cependant que ces informations doivent être prises avec précaution compte tenu de certaines limites dans les données déclaratives : espèces co-récoltées et/ou co-déclarées, mélanges poids sec/poids frais, problèmes de localisation, …). L’utilisation des données doit donc prendre en compte l’ensemble de ces limites, mais donne cependant un bon aperçu des prélèvements.
En 2018, la récolte d’algues de rive en Bretagne atteint 4553 tonnes d’algues fraiches. Le Finistère concentre 58% des tonnages récoltés avec une production de plus de 2622 tonnes d’algues fraiches. En deuxième les Côtes d’armor avec une production de 1931 tonnes d’algues fraiches. L’activité est anecdotique en Ille-et-Vilaine et dans le Morbihan.
La grande majorité des algues récoltées (79 % en 2018) est composée de fucales (A. nodosum, Fucus spp., H. elongata). De manière plus détaillée, les auteurs du rapport biomasse présentent les différentes espèces d’algues récoltées
En tonnes d’algues fraiches
- Ascophyllum nodosum 2359
- Himanthalia elongata et Fucus spp. 1251
- Palmaria palmata 333
- Chondrus crispus 316
- L. digitata, Saccharina latissima 151
- Ulva spp. 90
- Porphyra dioica 30
- Autres algues 22
Ce tonnage d’algues récolté est assez stable depuis quelques années. Or la demande en biomasse est de plus en plus forte. Afin de pérenniser les activités d’exploitation des algues et d’envisager des développement futurs, les professionnels mettent en place différentes stratégies pour fournir les algues de demain : estimation des biomasses disponibles pour identifier des récoltes de zones non encore exploitées, optimisation des modes de récolte pour permettre une meilleure repousse/croissance, installations de culture des algues en mer et à terre, développements des méthodes de culture des algues en forte tension, exploitation des biomasse captées naturellement en concessions ostréicoles, …
Si les algues sont une des solutions pour l’alimentation durable du futur, il est impératif de pouvoir récolter ou cultiver durablement ces algues.